Une étude a été réalisée par Ipsos sous la demande du CNCD-11.11.11 auprès des citoyens belges à propos de leur vision sur le « monde d’après Coronavirus ». Il ressort de ce sondage que les Belges aspirent à un monde plus juste et plus durable, et parmi les nombreuses conclusions tirées par l’analyse de leurs réponses : la relocalisation de l’économie, l’économie circulaire et les énergies renouvelables font l’objet de réflexion auprès des citoyens. Nous retrouvons les chiffres suivants : 82% des Belges aspirent à privilégier les circuits courts pour l’alimentation, 79% aspirent à investir dans les énergies renouvelables, 75% aspirent à développer l’économie circulaire.
Pour vous, qu’est-ce qui explique cette sensibilisation plus intense pour le développement durable venant de la part des Belges ? Est-ce le début d’une transition ambitieuse des mentalités par rapport à notre mode de consommation ?
Je pense que c’est une évolution progressive. Les Belges étaient déjà sensibles au développement durable avant la pandémie de covid-19. Ainsi, pour la pointe visible de l’iceberg, ils étaient plus de 70 000, en 2019, à défiler dans les rues de Bruxelles demandant aux décideurs politiques de notre pays de prendre des mesures drastiques pour lutter contre le réchauffement climatique.
La crise sans précédent que nous traversons a toutefois amplifié cette prise de conscience des Belges en faveur du développement durable, en mettant cruellement en évidence la fragilité de notre système économique, son incapacité à anticiper et à faire face aux chocs. De plus en plus de Belges réalisent que courir après une croissance infinie dans un monde fini, comme le promeut l’économie mondialisée, nous mène droit dans le mur. Ils réalisent que le modèle économique dominant qui extrait, produit, consomme et jette met en danger l’avenir de l’humanité. Et ce changement de pensée induira inévitablement des changements de comportements structurants.
La consultation citoyenne que Bruxelles Environnement a menée auprès de 5 000 Bruxellois confirme cette prise de conscience environnementale. Ainsi, 1 Bruxellois interrogé sur 3 déclare qu’il diminuera l’utilisation de la voiture et 1 sur 2 compte se déplacer davantage à pied. 1 sur 3 a changé ses habitudes de consommation pendant le confinement et s’est davantage rendu dans les épiceries de son quartier.
Pensez-vous que cette crise sanitaire va marquer un tournant dans la vie économique, sociale et environnementale de notre pays ? Quel sera son impact sur le monde de demain ?
Je suis convaincue que le monde de demain ne sera pas identique au monde d’hier. L’économie mondiale a subi des modifications profondes et les comportements des citoyens ont fort évolué au cours de ces derniers mois. Pensons notamment au télétravail, au succès des circuits-courts mais aussi du commerce en ligne.
La crise de la covid-19 a donc amplifié la prise de conscience des Belges pour le développement durable. Elle a aussi montré le dynamisme et la créativité des entrepreneurs.euses bruxellois.es se jouant des contraintes pour trouver des solutions d’urgence afin, par exemple, de produire des masques, d’organiser la commande en ligne et la livraison à partir de commerces bruxellois, etc. Cette crise est une opportunité pour accélérer le changement de paradigme de notre économie vers un modèle plus local, plus durable, plus solidaire et plus respectueux de notre environnement et de notre planète.
Cette transition économique, elle ne devra toutefois laisser personne sur le bord du chemin. Ainsi mon cabinet travaille actuellement, avec les administrations, sur un programme d’actions durables pour soutenir l’écosystème économique malmené par la crise actuelle mais aussi pour emmener toutes les entreprises dans la transition économique. Deux axes majeurs sont développés : l’innovation et la révision des instruments économiques pour stimuler le changement, notamment dans le secteur de la construction.
En quoi le secteur de la construction est un secteur clé pour entamer cette transition une économie durable et vers le circulaire ? Pensez-vous à des projets en particulier qui sont pour vous porteur de cette transition ?
Le secteur de la construction est une secteur clé de l’économie circulaire pour de nombreuses raisons telles que son impact sur le climat – le bâti est la première source d’émission directes de gaz à effet de serre à Bruxelles – mais aussi les opportunités qu’il offre en matière de réemploi, d’emplois locaux, de valeur ajoutée pour les Bruxellois.es,…
Mon collègue Alain Maron, Ministre de l’Environnement, a lancé une ambitieuse Stratégie Rénovation pour accélérer le taux de rénovation du bâti bruxellois et renforcer la construction circulaire. En 2020, 2 millions d’euros ont été affectés au projet Build Circular.Brussels, qui se poursuivra en 2021 sous la houlette du Centre de référence Construction et la Confédération Construction, pour former et accompagner les professionnels en construction circulaire. Préparer le secteur à la demande était la première étape. Nous avons ensuite augmenté le budget des primes énergie (+ 60 % en 2021 par rapport à 2020) et de l’accompagnement des propriétaires afin de les inciter à se lancer dans la rénovation de leur logement. Comme 40 % des logements bruxellois sont en copropriété, un nouveau service sera mis en place en 2021 pour les soutenir plus spécifiquement. Les professionnels de la construction peuvent eux aussi se faire accompagner, par le Facilitateur Bâtiment durable de Bruxelles Environnement.
Enfin, 2021 verra le lancement de l’Alliance Emploi Environnement Finances pour la Rénovation durable, qui mobilisera tous les acteurs en vue de développer des filières économiques liées à la rénovation énergétique du bâti et créer des emplois de qualité. Car c’est en oeuvrant tous ensemble – citoyens, entreprises, architectes, financiers, pouvoirs publics – que nous accélérerons la rénovation durable et circulaire du bâti bruxellois, pour améliorer notre confort de vie et réduire nos émissions de gaz à effet de serre. Pour ancrer ce mouvement dans la durée, les écoles bruxelloises sont aussi impliquées. Elles accueillent plus de 200 000 enfants, qui seront les générations durables de demain !
Interview de Madame la Secrétaire d’Etat, Barbara Trachte, réalisée par la Confédération Construction Bruxelles-Capitale